Nabi Saleh, autopsie d'une manifestation

Nabi Saleh est un petit village au nord ouest de Ramallah de 500 habitants. Une colonie illégale s’est installée à quelques pas du village. Non seulement, les villageois se font voler leurs terres mais en plus, l’armée envahit régulièrement le village en tirant sur tout ce qui bouge, blessant et arrêtant même les enfants.  Depuis un an, plus de 30% de la population a été blessée dont une soixantaine d’enfants.   À chaque vendredi, a lieu une manifestation non-violente.   Des activistes, palestiniens et internationaux y participent.  J’y étais ce vendredi avec quelques amis.

Tout d’abord, nous avons dû nous taper une excursion d’une heure et demie par les collines car le village était fermé par les soldats israéliens pour empêcher les activistes d’y entrer.

  

La manifestation a débuté après la prière du vendredi. Comme nous approchions, les soldats nous lancèrent des gaz lacrymogènes.  C’était l’entrée en matière. Puis pendant un petit moment, ils nous laissèrent venir plus près. Aucune violence de notre part : que des slogans et des chants contre l’occupation. 

Mais soudain tout a dégénéré et là ce fut la course pour se mettre à l’abri.  Pendant que je courais, je me suis retournée et ai vu un des manifestants tomber par terre. Il fut blessé par une canette de gaz. 

Comme vous le voyez dans les vidéos, les gaz lacrymogènes vous aveuglent et vous empêchent de respirer.  La peau du visage, des mains et des bras vous brûle.  Le liquide blanc que vous voyez c’est du lait qui est un anti-poison. Les effets négatifs de ce gaz peuvent durer plusieurs jours : sensation de brûlure et difficulté à respirer.

Les soldats savaient que plusieurs personnes s’étaient réfugiées dans la maison où j’étais.  Ils savaient que des blessés s’y trouvaient.  Pour faire bonne mesure, ils entourèrent la maison et lancèrent des gaz devant les fenêtres. 

Se tenir désarmés devant des soldats équipés de fusils c’est ce qu’on appelle un acte de résistance non-violent.  C’est aussi y retourner encore et encore même lorsque votre compagnon a été blessé, arrêté ou pire.  Le garçon blessé que vous voyez dans la vidéo, sera de retour parmi nous une heure plus tard et continuera à manifester jusqu’à la fin.

Nous y retournâmes donc et encore ils nous attaquâmes.  Peu après plusieurs des soldats se dispersèrent dans le village et ils lancèrent des gaz un peu partout.

On décida mes amis et moi de descendre plus bas vers la station service car il y avait un groupe d’activistes avec des soldats. Ils nous attaquèrent à coup de bombes assourdissantes.

Plus tard, les soldats prendront en sandwich un groupe d'activistes qui était dans les collines et un paramédic sera blessé sérieusement.  À ce moment-là on alla tous les rejoindre pour faire front commun avec eux contre les soldats.

Tout le monde était furieux qu’un paramédical qui était là pour soigner les gens soit tiré à bout portant par les soldats.  La journée s’étira encore pendant longtemps et nous fûmes encore attaqués quand on redescendit au village.    Nous pûmes quitter le village vers 8h00 du soir.  Ce jour-là deux activistes allemands et deux activistes palestiniens dont le paramédic seront blessés par les gaz lacrymogènes et un israélien activiste sera arrêté.

Ces manifestations sont importantes pour les gens du village car ils subissent jour après jour les arrestations et les attaques des colons et des soldats.  Elles démontrent à l’Occupant qu’ils ne peuvent pas voler les terres palestiniennes sans que la communauté internationale soit au courant.  Elles démontrent à l’entité sioniste que nous, activistes de toute nationalité, n’abandonneront pas nos frères et sœurs palestiniens et que nous ferons front commun avec eux. Que nous nous tiendrons à leur côté et que nous lutterons avec eux pour une Palestine Libre.